« Tant que nous aurons des châtaignes, nous aurons du pain »
Les promeneurs que nous sommes, n’avons pas pu ne pas remarquer
la présence de nombreux châtaigniers lors de nos divers promenade ! Celui-ci fut un élément important de L’histoire de nombreuses communes en France, et historiquement une
agriculture vivrière pendant de nombreuses décennies !
Avec ses longues feuilles dentelées et son écorce brune,
le châtaigner est facilement reconnaissable. Élancé, majestueux, cet arbre de
la famille des Fagacées peut atteindre 25 à 35 mètres de hauteur et d’une
circonférence pouvant atteindre, pour les plus âgés, près de 10 mètres à la
base. La floraison intense du châtaignier a lieu au tout début de l’été, elle
s’étale sur une quinzaine de jours, laissant flotter dans l’air des effluves puissants.
Les fleurs mâles sont regroupées en longs chatons odorants, et les fleurs
femelles donnent des châtaignes enfermées dans des bogues. Arbre majestueux, le
châtaignier fait partie des plantes mellifères dont les abeilles raffolent ! Au
moment de la floraison, vous serez impressionnés par le nombre d’abeilles
attirées par le châtaignier, Source de pollen, de nectar et de miellat.
Un peu d’histoire…
Bien peu d’arbres ont lié leur destin avec l’homme comme
le châtaignier… hormis peut-être l’olivier. Originaire d'Asie Mineure, d'Arménie selon les uns, de
Turquie selon d'autres, ou même présent sur notre territoire depuis l'ère
tertiaire pour d'autres encore (des pollens de châtaignier ont en effet été
trouvés en grande concentration dans les marnes tertiaires de Celleneuve, près
de Montpellier). Le châtaignier est décrit pour la première fois au 4ème siècle
avant J.C. par Théophraste
dans son "Histoire des plantes". Historiquement, l'arbre serait
arrivé chez nous via la Grèce et l'Italie dès le 1er siècle après J.C. II y
prospère alors en choisissant ses terrains de prédilection en fonction de leur
acidité, de leur exposition, de leur altitude (rarement au-dessus de 600-700
mètres) mais surtout en fonction du climat.
Richelieu favorisera le développement en France des
châtaigniers qu’on appela les "cardinaux", puis par la suite, la
grosse châtaigne "marron de Lyon". Louis XIV en a fait massivement
importer cette essence en Ile-de-France, et notamment en Hurepoix, pour lutter
contre la famine. L’implantation de cette spécialité parfois éparpillée,
parfois regroupée en châtaigneraies est
importante sur notre territoire. Son bois était nécessaire pour de
nombreux métiers tel que : Tonnelier, menuisier, charron, charpentier, et
même vannier… Mais aussi et surtout ses
fruits qui durant des siècles, ont fréquemment préservé de la famine bien des
familles. Les années de vaches maigres, les châtaignes compensaient en grande
partie, le manque voire l'absence de céréales. Remplaçant ainsi bien souvent,
pour les populations les plus pauvres de notre commune, le pain. Le châtaignier
aussi surnommé "le pain du pauvre" a longtemps joué un rôle prépondérant
dans l'alimentation humaine. L’hiver où rien ne pousse, les châtaignes
nourrissaient hommes et bêtes pendant tout le temps où la nature était
morte. La conservation du fruit, à l'état sec, a fait que souvent elle
permettait de supporter sans trop de dommage une à deux années de mauvaises
récoltes. On a longtemps considéré la châtaigne comme synonyme de pauvreté, du
fait que sa consommation correspondait
souvent à une classe sociale particulièrement démunie. Cette
considération, est devenue par la suite une affirmation péjorative, Un jugement
dépréciatif émis en grande partie par ceux qui n'avaient sûrement pas les mêmes
préoccupations de survie que ceux qui les subissaient véritablement !
Dans le courant du 19ème siècle, les châtaignes vont toutefois
être détrônées par les pommes de terre, sur les tables de nos campagnes. A la
fin du 19ème siècle, il restait encore sur notre commune, 95 hectares plantés
en châtaigneraies. Le marron glacé connu sur la table des princes du 17ème siècle
devient un produit de fête à la fin du 19ème siècle et va contribuer à
freiner un peu le déclin de la production. 3 confiseurs industriels vont se
créer. Le précurseur est C. Faugier, en 1887, suivi de la maison Sabaton, en
1907, puis de la Société de Marrons glacés d’Aubenas de G. Imbert, vers 1914.
Puis à partir du milieu du 20ème siècle dans les années 50, sont arrivés
les voitures, les bulldozers, les tracteurs. Il y a eu un changement
d’agriculture et de nourriture. Finie l'époque où l'arbre revêtait une importance
vitale. Dès lors, les agriculteurs ont négligé son entretien, la châtaigne
n’avait aucun intérêt ou très peu. Du coup, cette ressource est tombée en
désuétude !
A la fois arbre fruitier et arbre forestier, le
châtaignier a su être au fil du temps un fidèle compagnon de l’homme, lui
apportant une nourriture saine et abondante. Car pendant longtemps, la
châtaigne a permis de faire vivre de nombreuses familles. Produire des
châtaignes, c’était une volonté d’avoir de la nourriture quasiment sur toute
l’année, car on pouvait les conserver et les manger jusqu’en avril. Très
répandue sur notre commune en raison de sols acides et sablonneux, cette
culture assurait d’abondantes récoltes. Les châtaignes étaient alors vendues
sur les marchés des villes proches, où elles étaient encore vendues
au début du 20ème siècle, suivant les années, entre 150 et 200 sacs de 120
litres.
De nos jours…
Il reste encore
beaucoup de châtaigniers dans les divers bois qui parsèment notre commune. De
même, la Vallée Maréchal offre encore un impressionnant alignement de
châtaigniers. Et surtout, depuis une trentaine d’années, on assiste à un
renouveau certain pour ce fruit. Il y a un peu partout en France, comme sur
notre commune d’ailleurs, de nombreuses collectivités qui ont compris qu’il y
avait une carte à jouer avec la châtaigne. Ainsi des fêtes de la châtaigne, où
celle-ci est mise à l’honneur, sont organisées un peu partout en France. À
partir de là, il y a eu aussi un intérêt pour les gourmets et tout le monde s’y
est mis ! Les liquoristes ont inventé des liqueurs à base de châtaigne,
les charcutiers ont mis de la châtaigne dans leurs pâtés, les pâtissiers ont
fait des gâteaux à la châtaigne. Il y a eu un engouement général pour ce fruit.
En cuisine…
La châtaigne aux propriétés nutritives riches, est un
produit très intéressant. On l’utilise aussi bien en été qu’en automne et en
hiver. Ce fruit supporte tout, les épices, le sucre, l’alcool… Une excellente
alternative aux féculents habituels. Elle se décline sous toutes les formes :
en farine de châtaigne, en beurre à la châtaigne, en purée, en sirop, en
confiture, en crème, en confiserie… À varier à l’infini selon les goûts et les
saisons ! Elle accompagne aussi bien le sucré que le salé. Ainsi des liquoristes,
des fabricants de bières, des salaisonniers, des confituriers, des
biscuiteries, des boulangeries, des restaurateurs ont bien compris l’intérêt de
ce fruit !
Le miel de
Châtaignier…
Reconnaissable à sa couleur ambrée et sombre, le miel de
châtaignier est très recherché pour ses arômes prononcés, des saveurs boisées
et une certaine amertume. Monofloral, le miel de Châtaignier reste liquide
pendant plusieurs mois.
Le saviez-vous ?
- La châtaigne est un fruit comestible du
châtaignier, alors que le marron est une graine toxique du marronnier
d’Inde. Les deux appartiennent d’ailleurs à des familles différentes, et n’ont
donc rien en commun, à part évidemment une forte ressemblance visuelle.
- On appelle également marron, une châtaigne qui répond à
certains critères de forme (une châtaigne grosse, ronde, et non cloisonnée).
- Lorsqu’on parle de marron (notamment dans la
crème de marron ou dans les marrons glacés), il s’agit en réalité
de grosses châtaignes !
- À la fin du 19ème siècle, en France, on produisait
500 000 tonnes de châtaignes. Aujourd’hui on est à 8 à 10 000 tonnes,
alors que la consommation est de 20 à 23 000 tonnes.
- De la plantation à la production de châtaignes, 5 à 8
ans sont nécessaire.
- Jusqu’à la seconde guerre mondiale, les vieux troncs de
châtaigniers servaient de ruche.
- Pour mesurer l’âge d’un châtaignier, il faut compter le
nombre de cernes dans le tronc.
- Le bois de cet arbre est réputé dur et robuste. Il est
très utilisé en ébénisterie, en menuiserie ou pour réaliser des charpentes.
- Un producteur de châtaigne est appelé un
castanéiculteur.
- Un arbre de belle taille peut produire jusqu’à 60 à 70
kg de châtaignes.
"Une
richesse qui fait partie de la biodiversité de notre commune, mais aussi un
élément important de notre patrimoine. Il est normal et légitime, dans un
contexte historique et social, de rendre au châtaignier et à la châtaigne, même
s'ils n'ont plus l'importance d'antan, les honneurs auxquels ils ont droit en
tant que bienfaiteurs de la Nation. Ce n'est finalement qu'une juste
reconnaissance, ne serait-elle simplement que celle du ventre !"
Éric.L
Sources : Antoine Augustin Parmentier
(1737-1813), Traité de la châtaigne, Monory édit. Paris, 1780.
Posté par le p'tit rapporteur du Magarin